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Flore Sentinelle

Un projet commun pour la connaissance et la gestion de la flore à l’échelle des Alpes.

Écosystèmes complexes et emblématiques, les Alpes françaises hébergent une importante richesse floristique avec environ 60 % de la flore française métropolitaine. 

Dans un contexte de changement climatique particulièrement pressant sur ce territoire, la flore alpine est reconnue comme les espèces qui seront le plus touchées dans les prochaines années. En effet, les hausses des température dans les Alpes durant le siècle dernier ont été plus marquées que la moyenne globale terrestre, avec une augmentation depuis 1980 qui dépasse 1,5 °C.

Par manque de données et de modèles appropriés, les conséquences à attendre de ce changement sur les plantes de haute montagne sont encore difficiles à appréhender.

Par conséquent, ces éléments montrent la nécessité de conserver la flore alpine, en priorité les éléments les plus rares et menacés et d’avoir une organisation et des méthodologies partagées et concertées. Pour cela, un réseau d’acteurs de la conservation de la flore s’est construit à partir de 2008 sous l’animation du Conservatoire Botanique National Alpin (CBNA), avec pour objectifs d’identifier et comprendre les dynamiques démographiques des espèces végétales et des habitats, sentinelles pour le suivi des changements globaux dans les Alpes françaises.

 

 

Le réseau 

En 2018, plus de 25 structures comprenant le CBNA, l’ONF, les Parcs Nationaux, les Parcs
Naturels Régionaux, les CEN et des gestionnaires de sites Natura 2000 ont déjà adhéré à la charte
et participent au réseau. Le réseau vise à développer les échanges et mutualiser les connaissances et les compétences afin de mettre en œuvre des actions concertées de préservation de la flore et contribuer à l’élaboration d’une vision homogène de la flore à l’échelle du massif alpin.

Les travaux mis en place par le réseau – suivis, travaux, projets de recherche – répondent aux enjeux suivants :

  1. conservation : évaluer et limiter l’érosion de la biodiversité ;
  2. réglementation : contribuer aux politiques publiques sur la biodiversité ;
  3. changements globaux : comprendre l’évolution des espèces et des habitats alpins en réponse aux changements globaux.

Le réseau travaille sur l’établissement de protocoles communs simples et robustes à l’échelle du territoire des Alpes, selon une stratégie de priorisation des suivis dans les secteurs/stations à enjeux, permettant la mise en place de suivi sur du long terme. 

Les suivis sont réalisés à plusieurs échelles (territoire, station, individu) sur l’ensemble des Alpes françaises et viennent alimenter la mise en œuvre d’une stratégie de conservation de la flore des Alpes dans le but de limiter l’érosion de la biodiversité.

 

Les protocoles 

Il existe plusieurs types de protocoles. Les protocoles espèces permettent de suivre des espèces identifiées par le réseau comme étant d’intérêt et sur la base d’un état des lieux (bilan stationnel) réalisé au préalable. En fonction de l’échelle à laquelle on souhaite avoir des résultats de tendance de l’espèce étudiée, deux protocoles différents sont appliqués : 

  • à l’échelle des Alpes on appliquera le suivi territoire ;
  • à l’échelle des site le suivi station.

Les protocoles habitats se déclinent également à ces deux échelles.

Suivi territoire

Le suivi territoire se base sur un échantillonnage de pointages connus de l’espèce ou de l’habitat ciblé. Sur chaque pointage échantillonné, des observations sont réalisées :

  • pour les espèces, en présence/absence de l’espèce sur des mailles de 25mX25m
  • pour les habitats, en présence/absence d’espèces caractéristiques au sein d’une maille de 50mX50m ou de 100mX100m

Les mesures sont réalisées tous les 3 à 5 ans par les gestionnaires d’espaces naturels sur leurs sites.

Suivi station

Le suivi station vise à comprendre la dynamique des populations et des compositions végétales sur une station donnée ; il peut être répliqué sur plusieurs stations. Sur chaque station, des observations sont réalisées sur des placettes permanentes : 

  • relevés des perturbations, données de gestion ;
  • données environnementales (Température, granulométrie) ;
  • pour les espèces, effectifs/fréquence, ;
  • pour les habitats, relevés de végétation.

 

Relevés botaniques par le CBNA et le PNM © A.Rauzier / PnM
Relevés botaniques par le CBNA et le PNM © A.Rauzier / PnM

Et concrètement, quels sont les suivis mis en place dans le parc national du Mercantour ?

Les protocoles flore

Concernant les protocoles flore, 3 espèces sont suivies avec le suivi territoire (décrit ci-dessus) :

Le Géranium argenté, Geranium argenteum

Le Géranium argenté, Geranium argenteum, est une espèce rare, présente sur seulement quelques localités dans le 04, 05 et 38. Dans le Mercantour, elle n’est connue que dans la vallée du Verdon. C’est une espèce possédant une protection nationale.
Elle se reconnaît facilement grâce à ses feuilles soyeuses et argentées, profondément divisées en segments trifides. Ses grandes fleurs roses pâles apparaissent en juin. On la retrouve sur des rochers et rocailles herbeuses sur calcaire, aux étages subalpin et alpin. 

Géranium argenté, Geranium argenteum © S. Roux / PnM
Géranium argenté, Geranium argenteum © S. Roux / PnM
Géranium argenté, Geranium argenteum © S. Roux / PnM

 

L'Adonis des Pyrénées, Adonis pyrenaica

L’Adonis des Pyrénées, Adonis pyrenaica est une espèce qui comme le nom l’indique, est présente dans les Pyrénées. Toutefois, l’espèce est aussi présente dans le Mercantour, dans la vallée du Haut Var et du Verdon. C’est une espèce qui est soumis à une protection nationale. 

Elle est facilement reconnaissable à ses grandes fleurs jaune d’or et à ses feuilles très découpées. On la retrouve dans des éboulis calcaires. 

Adonis des Pyrénées, Adonis pyrenaica © L. Martin Dhermont / PnM
Adonis des Pyrénées, Adonis pyrenaica © L. Martin Dhermont / PnM
Adonis des Pyrénées, Adonis pyrenaica © L. Martin Dhermont / PnM

 

La Reine des Alpes, Eryngium alpinum

La Reine des Alpes, Eryngium alpinum, est une espèce emblématique des Alpes. On la retrouve dans le parc national du Mercantour exclusivement dans le vallon du Lauzanier en Ubaye.

C’est une espèce protégée à l’échelle nationale. 

Elle est reconnaissable à ses inflorescences, constituées de minuscules fleurs blanches entourées de bractées violacées formant une magnifique couronne. Plus d'infos ici

Reine des Alpes, Eryngium alpinum © O. Laurent / PnM
Reine des Alpes, Eryngium alpinum © O. Laurent / PnM
Reine des Alpes, Eryngium alpinum © O. Laurent / PnM

 

Les protocoles habitats

Concernant les protocoles habitats, 2 habitats d’intérêt communautaire sont suivis :

Les combes à neige

Les combes à neige sont des milieux naturels d’altitude sensibles et à forts enjeux écologiques. Cet habitat possède une écologie bien particulière caractérisée par une période d’enneigement très longue, allant de 8 à 10 mois sur 12. Le période de végétation est donc très courte. Les combes à neige abrite des espèces bien particulières appelées chionophiles, qui sont adaptées à ces conditions très extrêmes. 

Face aux changements globaux actuels, cet habitat est soumis à de fortes perturbations. L’objectif de ce suivi est donc d’évaluer l’évolution de la végétation en lien avec le changement climatique et les changements d’utilisation des sols. 

Végétation typique d'une combe à neige © A. Rauzier / PnM
Végétation typique d'une combe à neige © A. Rauzier / PnM

 

 

Les bas-marais d’altitude (Caricion incurvae)

Les bas-marais d’altitude, appelés Caricion incurvae par les gestionnaires, sont un groupement pionnier des bords de torrents alpins. Ils forment des gazons clairsemés dominés par les joncs et les petits cypéracées. L’eau qui alimente le milieu est fortement oxygénée, avec un pH compris entre 7 et 8. La végétation de cet habitat ne supporte pas des températures journalières moyennes supérieures à 25°C et, pour cette raison, ne se trouve en France presque jamais en dessous de 2000m d’altitude. C’est un habitat d’intérêt communautaire prioritaire.

Habitat étroitement lié à l’eau et aux températures basses, il sera fortement impacté par les changements climatiques globaux des prochaines années. Il semble donc primordiale de le suivre afin d’observer les évolutions potentielles de la végétation. 

Caricion incurvae © M. Canut / PnM
Caricion incurvae © M. Canut / PnM
Caricion incurvae © M. Canut / PnM